Le plan d’opérations en Kabylie du Djurdjura que Randon soumit au ministère le 10 mai 1854 fut accepté le 19 mai.
Deux colonnes, l’une provenant d’Alger, commandée par le général Camou, l’autre de Constantine, commandée par le général de Mac-Mahon, devaient faire leur jonction sur l’oued Isser et progresser ensuite en direction de Tîzi Ouzou, puis de Bougie, en se maintenant sur la rive droite de la Sebaou. Randon se mit en campagne le 2 juin avec le général Camou, fit sa jonction avec Mac-Mahon le 12 juin, et, le 16, se porta sur la rive gauche de la Sebaou. Il s’avança jusqu’au sebt des Béni Yaya dont il fit l’ascension car ce sommet commandait l’accès aux villages des principales tribus de la montagne et dominait la Kabylie tout entière. Le 17, Mac-Mahon infligea de lourdes pertes à un rassemblement de 2 000 Kabyles, tandis que le général Camou et Randon affrontaient l’assaut des Béni Menguillet et des Béni Raten. Les 19 et 20 juin, le gouverneur général donnait l’assaut au gros village de Taourirt où trois mille combattants s’étaient retranchés. Deux cents montagnards furent attaqués à la baïonnette et précipités dans le ravin. Le village fut entièrement détruit et brûlé comme le furent, le 2 juillet, ceux de Sahel et de Taourirt des Béni Hidjer. Le 4 juillet tout était terminé, les Béni Menguillet, suivis des Béni Hidjer et des Béni Raten, faisaient leur soumission.
Ceci est le journal de la Batail de Tililith.
Il est tout a fait normal pour gagner des galons de minimiser les pertes..Une bataille qui ne dura que deux jours contre 2000 Kabyles?
En effet ces colonisateurs n’arrivèrent à Ighil Ouâni qu’après de grande pertes,pour se venger,ils brulèrent Taourirth.
Telle était la version officielle, mais trouvant que « la guerre prenait une mauvaise tournure en Kabylie », Berbrugger reprit contact avec Urbain et lui adressa une note rédigée à partir de sources sérieuses qui donnait des nouvelles beaucoup moins satisfaisantes de la colonne. La cavalerie et l’artillerie avaient été surprises, le 17 juin, par les Kabyles alors qu’elles étaient au vert. Elles avaient dû combattre jusqu’au soir et avaient perdu 350 à 400 morts et blessés. Le 20 juin avait été aussi une journée terrible : un colonel avait été tué et le maréchal Randon n’avait eu la vie sauve que grâce au dévouement et au courage du général Pâté qui avait pris une balle à sa place [9]. Toujours d’après Berbrugger, l’accueil que le maréchal reçut à Alger fut froid. La police dut arracher des affiches où on lisait : « Baton de maréchal perdu. Récompense honnête à qui le rapportera à l’hôtel du gouvernement général. » Les colons étaient furieux contre une expédition qui les avait privés de la main-d’œuvre kabyle dont ils avaient besoin pour rentrer une récolte qui s’annonçait magnifique… Le gouverneur en fut réduit à faire mentir L’Akhbar qui relata un accueil enthousiaste et omit de parler des 1 600 tués ou blessés, et à faire espionner le courrier des soldats qui racontaient ce qu’ils avaient vécu [10]. Les rapports de Randon au ministre firent état des difficultés de la progression en terrain montagneux et boisé, du mauvais temps, ainsi que de la résistance farouche des Kabyles retranchés dans leurs maisons crénelées comme des remparts. Il ne cacha pas non plus qu’en détruisant de fond en comble et en brûlant les deux villages homonymes de Taourirt, en faisant sauter leur mosquée, en coupant les arbres des vergers qui les entouraient il avait voulu faire sur le pays des Béni Menguillet « un exemple terrible » qui fut renouvelé chez les Béni Hidjer. La direction de l’Algérie s’émut de ces actes de vandalisme et prit soin de les faire disparaître des rapports communiqués au Moniteur universel. Mais le gouverneur général n’eut pas les mêmes scrupules et dans son édition du 30 juin, le Moniteur algérien publia le récit du sac de Taourirt des Béni Menguillet : « Pendant deux heures, deux compagnies de sapeurs avec leurs outils, aidés de quelques compagnies de tirailleurs du 7e de ligne procédèrent à la démolition de Taourirt. La mosquée dont le minaret s’élevait orgueilleusement au centre du village tomba en ruines sous l’explosion d’un sac à poudre. Toutes les maisons furent rasées ou brûlées, et les arbres fruitiers des nombreux vergers qui les entourent tombèrent sous la hache ou la scie. » Le 5 juillet, le même journal, publiait un récit identique sur ce qui s’était passé au Taourirt des Béni Hidjer : « Alors la destruction commença, et comme son homonyme des Béni Menguellet, le village de Taourirt fut rasé de fond en comble. Les maisons furent détruites, les plantations coupées et sa belle mosquée, l’orgueil de la tribu, qui lançait dans les airs son minaret d’une éblouissante blancheur, sauta sous l’effet d’une mine et disparut pour toujours dans un tourbillon de fumée. ».